mercredi 7 février 2018

Regarder : le manteau rouge de Nika



Les fleurs bleues, le dernier film d'Andrzej Wajda : le chef-d’œuvre pessimiste d’un vieillard de 90 ans.
Un hymne à la résistance, quel qu'en soit le prix.
Une facture classique et des images sobres pour raconter les dernières années de l’artiste Wladyslaw Strzeminski, principal représentant de l'avant-garde polonaise,  
un créateur incapable de compromis, honni par le régime stalinien. 
On suit la déchéance progressive de cet homme, qui a bien connu Kandinski et Malevich, qui enseigné aux Beaux-Arts et fondé le Musée d'art de Lotz.
De l’art d'asphyxier un être humain, en le bannissant inexorablement.

Impressionnant, le personnage de sa fille Nika*, adolescente têtue et fière, déchirée entre sa mère agonisante et son père déchu, mais croyant résolument en leur génie.
Nika, son regard azur intense, son pas décicé, petit chaperon dans son manteau élimé, semble être le fil conducteur, le point lumineux de l’histoire. Elle, qui finit dans un orphelinat, qu’on voit suivre seule le corbillard de sa mère, elle qui arrive trop tard à l’hôpital et demande à toucher les draps dans lesquels a agonisé son père.

Je suis allée faire quelques recherches sur le personnage réel. Difficile de trouver des informations. Il semble que Nika Strzeminska soit par la suite devenue médecin, psychiatre, écrivain et qu’elle ait beaucoup œuvré pour la réhabilitation de ses parents. Dans le film, à un certain moment, son père l'observe alors qu'elle quitte fâchée son appartement et prédit : "Sa vie ne sera pas facile".
J’aurais aimé que Wajda tourne la suite : l’histoire d’une petite fille au manteau rouge qui avait appris dès l’enfance à se battre obstinément et qui a dû mener une "vie pas facile". 

* Le rôle est tenu par la toute jeune Bronisława, fille de l'excellent Zbigniew Zamachowski, héros attachant de Trois couleurs : Blanc.

2 commentaires:

  1. Coucou Dad. Voilà un film que je n'ai pas vu mais en te lisant, je me dis que c'est une oeuvre à visionner. Le communisme a brisé nombre d'hommes, d'une manière ou d'une autre. On pourrait penser que l'Histoire a appris de ces heures sombres. Mais l'obscurantisme continue d'oeuvrer, parfois de manière larvée, d'autres fois au grand jour. Cela me fait penser à ces cités, gloires du temps passé, systématiquement détruites au nom de thèses foireuses: Palmyre en fait partie. Ou alors à ces musées mis à sac.
    Heureusement, l'être humain est doté d'une force incroyable et de tout temps, il y aura des gens qui tenteront de vaincre même s'ils seront au final bannis.
    Bises alpines.

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  2. Tu parles de musées mis à sac, c'est ce qu'on voit dans le film, avec le saccage d'une exposition montée par les élèves de Strzeminski, puis le nettoyage de la salle néoplastique du musée de Lodz où se trouvent à nouveau aujourd'hui ses œuvres. C'est tellement vrai, ce que tu dis, l'obscurantisme continue d’œuvrer. Et en même temps,dans l'histoire de l'humanité, il y aura toujours une résistance, une aspiration à la liberté de vivre et de créer. Belle après-midi, chère Dédé!

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